Edito : La publicité a-t-elle encore besoin des médias ? 

Printemps 2007, alors que je travaillais dans une agence média, j’écrivais une note de veille sur l’émergence de Facebook. Un grand professionnel des médias et de la pub, auquel je recommandais de s’inscrire, me dit : «A quoi peut bien servir ce truc !?».
Onze ans plus tard, ce truc est appelé «social media» et il rend fou les médias, comme nous le raconte Dominique Delport (pages 12/16). Pour les plus jeunes générations, il les a même remplacés.
D’après Pierre Calmard (pages 34/38), les marques médias doivent être des concepts, porteurs de valeurs, et protéiformes dans leurs modes de diffusion et de monétisation. La pluralité médiatique nourrit notre système démocratique et les annonceurs n’ont pas intérêt à se retrouver dans un monde monolithique.
Derrière le consommateur et le citoyen, n’oublions pas l’utilisateur. Comme l’explique Frédéric Filloux (pages 17/18), il a de nouvelles attentes, sa norme d’usage est sa relation avec Amazon et Netflix. S’ils ne veulent pas devenir des «trucs de vieux», les médias sont prévenus. Les jeunes veulent décider par eux-mêmes. Ils comprennent très bien l’écosystème publicitaire et sont disposés à recevoir des publicités qui leur parlent. Sinon, ils les rejettent avec l’adblocking.

Intelligence artificielle et personnalisation, protection des données personnelles et pertinence du message reçu, sont certainement les enjeux publicitaires d’aujourd’hui et de demain. Les régies publicitaires des médias traditionnels n’ont jamais autant innové, dans leurs offres cross-média, contextuelles ou ciblées. Les groupes médias multiplient les alliances pour faire face aux Géants et rappeler aux annonceurs que le média est le véhicule le plus efficace et le plus sécurisé pour faire voyager un message. Cela sera-t-il suffisant face aux GAFA ?

En attendant, Google et Facebook assoient leur domination (pages 10/11), ils captent la majeure partie de la croissance publicitaire dans le monde (pages 19/31) et en France (pages 39/50). Alors qu’il ouvre tous les possibles, le digital aurait même affaibli le marché de la communication dans son ensemble (pages 39/42). La majorité des internautes français ou européens estiment que les GAFA ont plus de pouvoir que l’Union européenne, se disent prêts à utiliser des services alternatifs, et sont conscients de subir régulièrement des fake news (pages 7/8). La défiance touche tous les acteurs : les politiques, les médias et les plateformes.

C’est pour toutes ces raisons que la 2^ème édition de l’événement Adforecast de CB News et CB Expert, dédié à l’économie des médias et aux prévisions publicitaires, élargit son champ à tous les enjeux du futur des médias : technologiques et humains.

Emmanuel Charonnat,
Directeur de CB Expert