Une tribune de Frank Durousset, COO et Cofondateur d’Adagio
La puissance des GAFA, leurs capacités de ciblage et la possible fin des cookies dans un avenir proche menacent l’équilibre (si ce n’est la survie) de nombreux éditeurs médias – déjà quelque peu affaiblis par un écosystème où une mise en concurrence accrue a conduit à la dévalorisation systématique de leurs inventaires publicitaires. Les éditeurs médias ont donc tout intérêt, pour faire cause commune, à se fédérer ; et à promouvoir la qualité de leurs offres publicitaires auprès des annonceurs et de leurs partenaires agences.
Concernant le premier point, l’initiative SSO (Single Sign On) pilotée par le GESTE est un premier pas capital et le projet d’identifiant commun à plusieurs sites, expérimenté cette année, devrait se généraliser dans les prochains mois.
En parallèle, chaque éditeur devra entreprendre un travail de fond pour mettre en avant la qualité de ses inventaires, en termes de contexte bien sûr (brand safety, qualité éditoriale…) mais aussi et surtout en termes d’attention publicitaire. En effet, compte tenu de la qualité des contenus proposés, la durée d’attention publicitaire est essentielle (à condition que les publicités soient bien positionnées), les annonceurs étant aujourd’hui conscients et prêts à acheter plus cher la durée d’exposition pour optimiser le ROI de leurs campagnes.
Une mesure de l’attention inadaptée
Pour évaluer la visibilité et la durée de visibilité d’un emplacement publicitaire, éditeurs et annonceurs se basent aujourd’hui sur des moyennes mesurées par des acteurs tierces tels que IAS, Adloox ou encore Moat.
Cette moyenne par emplacement qui mélange, par définition, des impressions non vues et des impressions vues – voire vues longtemps, implique systématiquement une sous-valorisation des bonnes impressions car la demande (en volume et en valeur) est déterminée par la moyenne.
Prenons l’exemple d’un emplacement valorisé avec 30% de visibilité et 3 secondes de durée moyenne. De par ces faibles indicateurs, cet emplacement sera probablement faiblement acheté et à un CPM dérisoire… Et pourtant, les 30% d’impressions qui sont réellement visibles sont peut-être vues 5 ou même 10 secondes, et devraient/pourraient donc être beaucoup mieux valorisées.
La prédiction de l’attention pour reprendre le contrôle de son inventaire
Dans l’objectif de mieux monétiser les impressions de qualité, les éditeurs doivent reprendre le contrôle de la valorisation de leur inventaire en allant au-delà de la moyenne mesurée par emplacement. Ceci en prédisant, en temps réel, la durée de chaque impression publicitaire.
Cette prédiction, impression par impression, doit prendre en compte les différents facteurs qui pourront influencer la probabilité de la durée d’exposition d’une impression, notamment :
. Le device utilisé :
– Le type d’appareil utilisé (Smartphone, tablette, desktop),
– La taille de l’écran,
– Le type de connexion internet, dans la mesure où le temps passé sur la page et donc sur les publicités dépendra de la qualité de la connexion.
. Le contexte :
– Le type de page : un utilisateur passera logiquement moins de temps sur la home-page que par exemple sur les pages articles,
– La rubrique : le temps de lecture variera en fonction du type d’article et selon chaque personne. Certains passeront plus de temps à lire un compte-rendu sportif alors que d’autres n’y consacreront que quelques instants, préférant lire avec attention les articles d’économie,
– La longueur de l’article : un pavé «BTF» (Below the fold), en dessous de l’écran, aura plus de chance d’être vu si l’article fait 2 pages,
– L’encombrement publicitaire par écran (en nombre et en surface) impactera forcément le temps d’exposition de chaque impression,
– Le positionnement des publicités dans la page par rapport au contenu.
. Le type de navigation :
– La rapidité de scroll influencera naturellement la durée d’attention publicitaire (avantages aux seniors, dont je fais partie, qui scrolleraient plus lentement que les autres),
– Le temps passé sur la page en fonction des sources de trafic et du moment de la journée (je passe plus de temps le soir à lire un article que dans la journée entre deux rendez-vous).
Tous ces facteurs sont bien sûr à croiser entre eux pour déterminer la probabilité de durée de visibilité d’une impression, et ce sans collecter de données personnelles pour être 100% compatible RGPD.
La prédiction de l’attention publicitaire impression par impression permettra à l’éditeur de reprendre le contrôle de son inventaire. En identifiant la qualité de chaque impression il sera en mesure de les segmenter en fonction de leur visibilité et de leur durée d’attention, et sera ainsi en mesure de mieux les valoriser en proposant une offre de qualité à l’annonceur.
Frank Durousset, COO et Cofondateur d’Adagio
Lire aussi :
. «L’attention, ça se gagne» (avril 2019)
. «KPIs : performance killed the branding star» (avril 2019)
. L’attention publicitaire : un nouvel indicateur de performance qui bouleverse l’écosystème digital (mars 2019)
. Mobile ads: quelles tendances pour une meilleure expérience utilisateur? (mars 2019)
. Retail : les tendances publicitaires à surveiller (de près) (janvier 2019)
. La publicité digitale en 2019 : un marché transparent, créatif et customer centric ? (décembre 2018)